Le retour à la prospérité passe par une grande réforme
de l'Etat propre à limiter son rôle dans le secteur
économique et à renforcer ses prérogatives dans le
domaine de la souveraineté. En effet, les acteurs
du système français de production et d'échange se
trouvent aujourd'hui gravement pénalisés par des administrations
qui les ponctionnent et les font plier sous le poids
d'une bureaucratie aussi pesante que parasitaire.
Pour permettre au marché libre de produire tous ses
effets bénéfiques et de relancer la croissance et
la prospérité, le Mouvement national républicain est
donc partisan de remettre l'État à sa place et, à
cette fin, d'alléger sa structure, de réduire ses
dépenses et de limiter la réglementation qu'il sécrète.
Maigrir et se muscler
S'agissant de son organisation interne, l'État apparaît
aujourd'hui comme un corps obèse et affaibli qui doit
donc maigrir et se muscler. Il n'est certes pas question
de contester son rôle souverain, mais de dénoncer
son insuffisante efficacité en ce domaine et sa propension
à sortir de ses compétences régaliennes. Il convient
en conséquence de mettre en œuvre un vaste plan de
modernisation des structures internes de l'État et
des collectivités publiques et, pour obtenir des résultats
d'envergure, de supprimer des pans entiers de l'administration,
de simplifier ses procédures de fonctionnement et
de réduire le nombre de ses agents.
Ainsi, par exemple, est-il normal que l'instruction
d'un dossier de prêt financier à un pays africain
" agite, selon l'expression d'Étienne Gingembre, une
légion de fonctionnaires à la Direction des relations
économiques du Quai d'Orsay, aux services extérieurs
du Trésor, à la Direction des relations extérieures,
à la COFACE et au Ministère de la coopération ? Puis
qu' interviennent la Caisse française de coopération
qui accorde une partie du prêt ainsi que la Trésorerie
générale pour l'étranger à Nantes " ? Cette propension
à la multiplication des instances et à la collégialité
généralisée est encore accentuée par la pratique de
plus en plus répandue des missions interministérielles.
Ainsi, la Mission pour la ville, fer de lance de la
politique d'intégration des immigrés, entraîne-t-elle
la mobilisation d'une foule de fonctionnaires appartenant
à d'innombrables administrations différentes pour
la mise au point de programmes d'action dont la complexité
administrative et budgétaire n'a d'égal que leur inefficacité
sur le terrain.
Et que dire de la superposition des administrations
liée à la multiplication et à l'importance croissante
des collectivités territoriales ? La décentralisation,
certes positive dans son principe, a conduit les régions
et les départements à se doter de services étoffés
pour accomplir des tâches autrefois exécutées par
les services de l'État sans que ceux-ci aient par
ailleurs été supprimés ou même significativement réduits.
Quant à la superposition des niveaux territoriaux-commune,
syndicat de communes, département, région, État, Europe-,
elle tisse un écheveau inextricable de compétences
et de financements croisés. Chaque projet d'équipement
public doit ainsi passer par le crible d'innombrables
services et reçoit des financements de toutes parts,
mobilisant ainsi un nombre sans cesse croissant de
fonctionnaires.
Décroiser les responsabilités
En premier lieu, il apparaît donc nécessaire de
revoir les mécanismes de décisions publiques et de
doter chaque département ministériel et chaque collectivité
territoriale d'un secteur de compétence qui leur soit
exclusivement affecté, sur lequel ils aient pleine
autorité et auquel seraient alloués les moyens budgétaires
ainsi que les pouvoirs administratif et politique
correspondant. Chaque instance locale ou sectorielle
ayant alors l'entière maîtrise de son domaine, les
décisions pourraient être prises directement par les
fonctionnaires et les politiques responsables. La
collégialité et la dilution des responsabilités qu'elle
entraîne s'en trouveraient réduites au minimum. Quant
aux moyens, ils seraient eux aussi et dans leur globalité
directement affectés aux instances concernées. Disparaîtrait
ainsi purement et simplement cette cause majeure de
lourdeur, voire de paralysie administrative, que représentent
les financements croisés. La modernisation de l'État
implique qu'on rétablisse des domaines clairs de compétence
et de financement exclusifs où les responsabilités
soient nettement identifiées.
Rayer de la carte
C'est dans cet esprit de simplification et de responsabilisation
qu'il convient de repenser également toute la structure
des services étatiques. S'il n'est pas question d'imposer
à l'administration les méthodes du secteur privé,
il est cependant nécessaire de réintroduire dans la
sphère publique des préoccupations de productivité
globale, car l'efficacité doit être aussi pour l'État
un impératif majeur. Les administrations feraient
donc systématiquement l'objet d'audits menés tant
par des cabinets indépendants que par des commissions
administratives. Le but n'est pas de rogner sur les
coûts de fonctionnement des services-ce qui limiterait
les moyens de travail des fonctionnaires et conduirait
paradoxalement à un surcroît d'inefficacité-mais,
en réalité, de rayer de la carte administrative les
services qui effectuent une tâche déjà réalisée par
ailleurs ou qui accomplissent des missions inutiles
ou non essentielles.
Or de tels services existent à profusion dans les
méandres administratifs. Est-il en effet absolument
indispensable d'entretenir à grands frais une mission
de recherche et d'étude, une mission pour la promotion
de l'emploi, une mission de nouvelle qualification,
un observatoire de l'action sociale décentralisée,
un observatoire européen décentralisé ? Et que dire
des organismes gravitant autour du seul Conseil régional
de Midi-Pyrénées, par exemple, tous dotés de budgets
mirifiques : le Comité consultatif de recherche pour
l'innovation (7 millions de francs), le Comité consultatif
d'accès aux nouvelles technologies (5 millions), le
Fonds régional pour l'initiative locale (7 millions),
le Comité régional à l'exportation (2 millions), l'Observatoire
économique régional du tourisme (9 millions), etc.
De tels organismes doivent être démantelés, car leur
existence même se révèle plus néfaste que les actions
qu'ils conduisent ne peuvent être bénéfiques. De façon
plus générale, il sera donc procédé à la suppression
massive d'un nombre considérable d'organismes tant
étatiques que locaux. Quant à la création de toute
nouvelle entité, elle sera dorénavant soumise à une
décision législative précédée d'une enquête approfondie
sur son utilité réelle. Dans le même esprit, le gouvernement
devra retrouver une structure plus resserrée. Inutile
de multiplier les départements ministériels et, à
travers eux, les centres de décision autonomes et
les administrations concurrentes. Un État recentré
sur ses fonctions souveraines doit être dirigé par
une équipe ministérielle peu nombreuse, soutenue par
une administration moins pléthorique. De même, le
nombre des collectivités territoriales devrait être
réduit et le département par exemple pourrait être
supprimé, les compétences de ce dernier pouvant dès
lors être dévolues pour une part aux régions et pour
l'autre aux "pays" et aux villes et les services correspondants
pour l'essentiel supprimés.
Un pour deux
L'allégement des structures administratives passe
aussi par la limitation du nombre des agents publics.
Aujourd'hui, en effet, les organismes parasitaires
se révèlent d'autant plus néfastes qu'ils sont animés
par des personnels à plein temps, lesquels, prenant
légitimement à cœur leur fonction, sécrètent une activité
au besoin artificielle Ces structures inutiles qui,
sans eux, resteraient des coquilles vides se mettent
à leur tour à distiller les méfaits de la bureaucratie,
alourdissant ainsi les dépenses publiques du poids
de leurs frais de fonctionnement. Le recul de l'étatisme
passe donc non seulement par la réduction des structures,
mais aussi par la diminution du nombre des agents
publics.
En 1914, la France comptait quatre cent mille fonctionnaires
d'Etat pour quarante et un millions d'habitants. En
1993, ils étaient deux millions cinq cent mille pour
une population de cinquante-six millions d'âmes. Le
nombre des fonctionnaires a donc été multiplié par
6,25 pendant que celui des habitants ne l'était que
par 1,36 ! Encore ne s'agit-il que des fonctionnaires
à proprement parler. Si l'on prend en compte l'ensemble
des agents à statut public, leur effectif atteint
six millions trois cent mille personnes, soit près
de 27 p. cent de la population active quand ce pourcentage
n'est que de 15 p. cent en Allemagne et de 8 p. cent
au Japon. De tels chiffres montrent combien la productivité
de l'administration s'est dégradée au fil des années.
Ainsi, de 1960 à 1990, le nombre d'exploitations agricoles
a été divisé par deux, tandis que, dans le même temps,
celui des agents du ministère de l'Agriculture avait
doublé. De 1976 à 1987, le taux d'activité de la flotte
de commerce a été divisé par trois et, parallèlement,
le nombre des fonctionnaires de la mer a augmenté
de 25 p. cent. Quant à la population d'élèves scolarisés,
elle est stabilisée à treize millions depuis 1976,
alors que les effectifs de l'Éducation nationale sont
passés de huit cent cinquante mille à cette date pour
grimper à un million deux cent mille en 1996.
Il est donc nécessaire de mettre un terme à cette
dérive et de réduire le nombre des fonctionnaires.
Une diminution de l'ordre de 20 p. cent de leur effectif
semble un objectif raisonnable et parfaitement réaliste,
comme l'a montré une étude de l'Institut de l'entreprise.
Pour obtenir ce résultat, il est hors de question
de procéder à des licenciements forcés et dérogatoires
aux statuts. La méthode à suivre relève d'une autre
logique. Elle implique d'abord de ne plus renouveler
tous les postes libérés par les mises à la retraite
et de ne recruter qu'un fonctionnaire nouveau pour
deux départs. Elle nécessite parallèlement la mise
en place d'un système de dégagement volontaire des
cadres par le biais de l'attribution d'un pécule substantiel
à ceux qui accepteraient de quitter l'administration.
Compte tenu du rythme actuel de renouvellement du
corps des fonctionnaires et de la mesure incitative
prévue en complément, la baisse de 20 p. cent des
effectifs devrait pouvoir être atteinte au bout de
sept ans. Des mesures similaires ont déjà été adoptées
en Allemagne. Le Royaume-Uni, quant à lui, a fait
passer le nombre de ses fonctionnaires de sept cent
trente-cinq mille en 1979 à cinq cent seize mille
en 1994.
Moins nombreux, mieux considérés
Cette réduction des effectifs de la fonction publique,
allant de pair avec une réorganisation de la structure
de l'administration, s'accompagnera d'un redéploiement
interne des personnels et des moyens administratifs.
Car, s'il existe des effectifs pléthoriques dans certains
services, ils sont insuffisants dans d'autres. C'est
ainsi que les effectifs du ministère de la Justice
et ceux de la police devront être augmentés significativement.
Le plan de modernisation de l'Etat préconisé par le
Mouvement national républicain ne vise pas en effet
à réduire l'importance du rôle de ce dernier, mais
au contraire à lui rendre son autorité et son prestige
en le recentrant sur ses fonctions souveraines. Dans
cet esprit, les fonctionnaires verront leurs positions
renforcées. Car la logique de l'allégement des structures
publiques est aussi celle du retour à leur efficacité
et donc de la réhabilitation de la fonction publique.
L'État constitue la colonne vertébrale de la nation
et les fonctionnaires, qui en sont les serviteurs,
exercent à ce titre une mission essentielle. Le mouvement
national, qui se veut le défenseur de la nation, est
donc très attaché à la sauvegarde de l'État et à la
protection de ceux qui le servent. Cessant d'être
eux aussi victimes, comme aujourd'hui, d'une bureaucratie
qui se dévore elle-même, les agents publics doivent
pouvoir retrouver la dimension véritable et originelle
de leur fonction. Tel est le sens de la réforme à
conduire. Aussi la diminution des effectifs s'accompagnera-t-elle
d'une revalorisation du statut des agents publics
qui regagneront le prestige et les avantages correspondant
à l'importance de leur tâche. Dans cet esprit, leur
niveau de vie et leurs conditions de travail seront
améliorés, en particulier pour ceux des agents appartenant
aux corps qui assurent les missions souveraines de
l'État. C'est ainsi qu'une fraction des économies
résultant de la diminution des effectifs pourra être
affectée à l'augmentation du traitement des agents
publics. Mieux vaut des fonctionnaires moins nombreux,
mieux rémunérés et mieux considérés qu'une fonction
publique pléthorique, bafouée et prolétarisée.
Privatisation
Encore faut-il qu'au-delà de l'État et des collectivités
territoriales, les entreprises publiques connaissent
elles aussi les effets bénéfiques d'un plan de modernisation.
Car leur situation actuelle est critique. La plupart
d'entre elles sont déficitaires, leur dette cumulée
représente environ 800 milliards de francs, voire
1000 milliards selon certaines sources, et leur histoire
se confond souvent avec celle du scandale de l'argent
public englouti en pure perte dans des projets sans
lendemain ou une gestion calamiteuse. Ainsi, selon
Jean-Pierre Brulé, 40 milliards de francs ont été
dépensés en vingt-cinq ans dans le développement de
l'industrie informatique nationale pour un résultat
des plus médiocres puisqu'aujourd'hui Bull affiche
15 milliards de francs de perte malgré le millier
d'emplois déjà supprimés lors des différents plans
de restructuration. En 1995, Renault encore étatisé
perdait l 000 francs par voiture vendue. Et que dire
de la SNCF qui reçoit depuis des décennies plusieurs
dizaines de milliards de francs de subventions annuelles
? Il est vrai qu'avec le Crédit Lyonnais, on atteint
les sommets du scandale puisque l'ensemble des pertes
s'élève à 130 milliards de francs, un véritable gouffre
financier !
Une telle situation n'est donc plus acceptable,
car elle obère lourdement le budget de la nation et
entrave, tel un boulet, l'ensemble des forces vives
de l'économie. La modernisation de l'État implique
donc dans ce domaine des actions d'envergure qui passent,
selon l'entreprise ou le service considéré, par la
privatisation ou la régénération.
Les privatisations seront poursuivies jusqu'à leur
terme, car il est malsain que l'État reste propriétaire
d'entreprises marchandes. Il faut donc, par exemple,
achever la privatisation de Renault et procéder à
celle des banques ou des compagnies d'assurances encore
étatisées. Il convient également de privatiser la
sidérurgie aujourd'hui assainie. Car la logique du
marché libre propre au Mouvement national républicain
conduit à prévoir la privatisation de toutes les entreprises
produisant des biens ou des services susceptibles
d'être vendus sur un marché. Et, de ce point de vue,
un vaste programme reste encore à mener pour la réalisation
duquel le Mouvement national républicain n'entend
pas suivre l'exemple désastreux donné par l'établissement.
Les entreprises à privatiser ne seront pas bradées
à des repreneurs étrangers, elles seront préalablement
assainies de manière à être vendues à des acheteurs
français à un prix correspondant à leur valeur réelle.
Service public
Cependant, l'économie devant rester subordonnée
à la défense des intérêts nationaux, il est des entreprises
qu'il importe de laisser sous le contrôle de l'État.
Tel est le cas des sociétés qui assurent les services
indispensables au fonctionnement du pays, comme les
transports publics, les communications ou la fourniture
d'énergie, ainsi que celles qui jouent un rôle central
dans la fabrication des armements. En raison de leur
mission de service public ou de leur fonction stratégique,
ces secteurs ont donc vocation à rester contrôlés
par l'État.
Des efforts considérables doivent cependant être
engagés dans ces entreprises pour en améliorer la
productivité, car il n'est pas sain qu'à cause des
déficits permanents, les Français soient amenés à
payer deux fois: une fois au guichet et une deuxième
fois par l'impôt. Certes, les entreprises publiques
supportent souvent des charges d'investissement très
lourdes, mais cet impératif ne doit pas les dispenser
des efforts de rentabilité auxquels s'astreignent
les sociétés privées. Ainsi, par exemple, est-il normal
qu'à la RATP le prix du carnet de dix tickets augmente
tous les ans et qu'il soit passé de 1991 à 1997 de
34,50 F à 48 francs, soit une augmentation de 39 p.
cent, nettement supérieure à la hausse générale des
prix, sans que le déficit de l'entreprise ait pour
autant diminué ? De même, est-il admissible que le
tarif d'affranchissement d'une lettre, qui était encore
de 2,30 F début 1992, ait atteint 3 francs en 1996,
soit une augmentation de 10 p. cent par an, quand
l'inflation annuelle est inférieure à 3 p. cent et
alors même que La Poste ne parvient toujours pas à
équilibrer ses comptes ? Il est donc indispensable
de remettre de l'ordre dans les entreprises publiques,
d'y introduire des méthodes propres à augmenter leur
productivité et de les soumettre chaque fois que cela
est possible à la contrainte bénéfique de la concurrence
contrôlée.
Le cas de la société Air France est à cet égard
intéressant, car il montre que des résultats importants
peuvent être obtenus assez rapidement. En trois ans,
les coûts unitaires ont été réduits de 16 p. cent~
ce qui représente une économie de 1,6 milliard de
francs. La productivité a progressé de 26 p. cent
pour les agents au sol et de 18 à 24 p. cent pour
les autres personnels. Certes, avec des pertes de
2,8 milliards de francs en 1995,1'entreprise nationale
n'est pas encore sauvée, car elle subit, avec un très
lourd endettement, le poids des erreurs stratégiques
passées. Mais cet exemple montre qu'une entreprise
publique, placée en situation de concurrence, est
capable, malgré son statut, de réaliser, elle aussi,
des gains de productivité importants et de tendre
vers la rentabilité. Et cette approche est bien préférable
à celle retenue pour Thomson, entreprise nationalisée
en 1982, et qui, après avoir perdu plus de l0 milliards
de francs en quatorze ans et avoir été recapitalisée
à grands frais par le contribuable, a ensuite été
programmée pour être cédée au franc symbolique à un
consortium coréen. Même si cette dernière opération
n'a pas été menée à son terme, ce processus montre
l'absurdité de la logique étatiste déconnectée des
critères de rentabilité.
La concurrence contrôlée
Le cas d'Air France montre également l'intérêt que
représente la concurrence, même lorsqu'il s'agit d'entreprises
publiques. ll convient donc de recourir à ce levier
pour contraindre les services publics à la bonne gestion.
A condition toutefois qu'une telle compétition soit
régulée et justement dosée pour permettre à la puissance
publique de conserver la maîtrise des opérations.
Le principe de cette concurrence contrôlée consiste
à imposer quatre contraintes aux sociétés concurrentes
: elles doivent être françaises, satisfaire à un cahier
des charges précis défini par l'État, pratiquer comme
les entreprises publiques l'exclusivité nationale
à l'embauche et ne sous-traiter qu'à des sociétés
françaises employant du personnel national. Ces règles
respectées, la mise en concurrence ne pourra mettre
en cause l'indépendance nationale ni provoquer des
perturbations lices à une compétition déloyale venue
de l'étranger. C'est dans ce contexte qu'il faut donner
un coup d'arrêt aux entreprises de dérégulation sauvage
menées actuellement sous la pression de la Commission
de Bruxelles. Ainsi par exemple, l'ouverture à la
concurrence internationale de nos lignes aériennes
intérieures conduit à supprimer les liaisons vers
les villes moyennes a priori moins rentables et, à
terme, à recruter des personnels du tiers monde. S'agissant
des services publics, cette mise en concurrence doit
être reconsidérée et s'opérer dans un cadre national
et selon des modalités permettant à l'État d'en conserver
le contrôle. Sous cette réserve majeure, elle sera
mise en œuvre chaque fois que la situation 1'autorisera.
Le recours à cette méthode pourrait ainsi améliorer
le fonctionnement de 1'ANPE et réduire son coût pour
le budget de l'Etat. Pour ce qui concerne en effet
la gestion administrative des chômeurs, les Assedic,
qui en assurent déjà une partie, pourraient se voir
attribuer la totalité de cette mission. Quant à la
fonction de placement, 1'ANPE l'exerce actuellement
fort mal et gageons que son efficacité serait décuplée
si elle n'en détenait plus le monopole. En Allemagne,
deux mille agences privées effectuent ce travail avec
des taux de réussite bien supérieurs à celui de l'Agence
nationale française.
L'Éducation nationale constitue un autre domaine,
bien plus important, où la concurrence entre le privé
et le public pourrait être intensifiée. Celle-ci existe
déjà puisque, dans notre pays, les parents peuvent
librement placer leurs enfants à l'école publique
ou à l'école privée. Il conviendrait cependant de
rendre cette compétition plus bénéfique pour le système
public. Actuellement, dans la mesure où les établissements
d'État ne disposent d'aucune autonomie, ils ne peuvent
pas s'adapter ni s'améliorer face aux écoles privées.
Il faut donc que la concurrence cesse d'être globale,
de système à système, pour devenir plus concrète et
s'exercer d'établissement à établissement. Pour cela,
il convient de supprimer la carte scolaire afin que
les parents puissent choisir librement l'école de
leurs enfants au sein même du secteur public. Il faut
aussi accorder aux établissements de l'État une certaine
autonomie de gestion, de recrutement et de sélection
leur permettant de tendre vers l'excellence. Symétriquement,
devra être mis en place un mécanisme de financement
du secteur privé, inspiré du chèque scolaire, qui
le place sur un plan d'égalité avec les établissements
publics. De la sorte, stimulée par une saine émulation,
l'éducation nationale devrait pouvoir améliorer ses
performances et redonner aux enfants une instruction
solide qui les arme pour l'existence.
Rembourser les retards
Afin de renforcer encore la qualité et l'efficacité
des services publics, il convient par ailleurs de
revoir leurs modes de fonctionnement interne trop
souvent soumis à un syndicalisme archaïque de privilège
et d'appareil. Ainsi, par exemple, le prélèvement
de 1 p. cent opéré de façon scandaleuse sur chaque
facture d'électricité au profit du comité d'entreprise
d'EDF contrôlé par la CGT sera supprimé. De même,
la grève sauvage et brutale qui prend en otage les
usagers est à proscrire. Un service minimum obligatoire
et légal doit être assuré en toute circonstance et
des modes d'action syndicale plus modernes seront
envisagés.
Enfin, il convient de créer sur le modèle britannique
des chartes d'usagers des administrations, afin de
mettre un terme à une intolérable inégalité qui place
le contribuable dans l'obligation absolue de payer
ses impôts alors qu'aucune sujétion comparable n'est
imposée aux services publics. Pourquoi dès lors, en
vue de rétablir un juste équilibre des engagements
réciproques, ne pas instaurer secteur par secteur
des normes objectives de qualité de service ? Lorsqu'elles
seront respectées, elles pourront servir de base pour
récompenser les fonctionnaires et, dans le cas contraire,
ce seront les usagers qui bénéficieront d'une indemnisation.
Ainsi, par exemple, le respect des horaires peut-il
constituer un élément majeur de la charte de qualité
de la SNCF : si l'objectif de ponctualité des trains
n'est pas rempli, les usagers auront droit à être
remboursés d'une partie du montant de leur abonnement
ou de leur billet.
Ainsi la modernisation de l'État passe-t-elle par
un allégement de ses structures et par un perfectionnement
de ses méthodes de gestion pour réduire le coût de
l'administration et améliorer l'efficacité des services
publics. Elle doit aussi passer par une réduction
massive des crédits all]oués aux collectivités publiques.
La compression des dépenses
A cette fin, le Mouvement national républicain entend
donc engager un vaste plan de compression des dépenses
publiques consistant en premier lieu à geler globalement
les budgets à leur niveau actuel en francs courants.
Compte tenu des taux de croissance et d'inflation
prévisibles, une telle disposition créerait en sept
ans une économie d'environ 500 milliards de francs.
Encore faut-il que cette mesure s'applique à toutes
les entités publiques. Nous verrons comment elle peut
être mise en œuvre sans dommage pour la protection
sociale. Mais, s'agissant des collectivités territoriales,
seul le vote d'une loi pourra les contraindre elles
aussi à bloquer leur budget en francs courants. Les
maires ou présidents d'exécutif qui, sauf dérogation
exceptionnelle, ne se plieraient pas à cette obligation
devraient être sanctionnés, et la collectivité qu'ils
dirigent placée sous la tutelle du préfet. Il appartiendrait
bien sûr à l'État de garantir aux communes, départements
et régions, le niveau de subvention qu'il leur octroie
et, au-delà, de donner l'exemple en s'imposant à lui-même
cette discipline de fer. Pour donner à cet effort
collectif la dimension d'une priorité nationale, le
président de la République aurait à en prendre personnellement
l'engagement devant tous les Français. Cette mesure
d'exception, qui devrait s'appliquer avec une grande
rigueur sur une période de sept ans, constitue en
réalité la seule réponse adaptée à la gravité du problème
des finances publiques. Elle garantirait que le taux
de prélèvements publics par rapport au PIB pourrait
baisser spectaculairement à l'issue de cette période.
Les coupes claires
Cette limitation globale des dépenses publiques
ne dispenserait cependant pas de procéder à des redéploiements
internes de grande ampleur. Certains postes budgétaires,
concernant notamment la politique familiale, le retour
à la sécurité et le développement de la propriété
populaire, exigeront des augmentations de crédit en
valeur réelle qui devront donc être compensées par
des diminutions drastiques sur d'autres postes. Ces
mesures d'économie se traduiront par la réduction,
voire la suppression, de chapitres de dépenses couvrant
des actions inutiles, sinon nuisibles, notamment ceux
que l'on trouve dans le titre V du budget correspondant
aux interventions de l'Etat.
Parmi celles-ci, on peut citer la quasi-totalité
des prétendues aides à l'emploi qui, s'élevant à 139
milliards de francs en 1996, sont en réalité totalement
inefficaces. Une étude réalisée par le cabinet de
conseil et d'audit Coopers et Lybrandt fait apparaître
que 4 p. cent seulement des entreprises recrutent
en raison des aides qu'elles reçoivent. En effet,
les firmes perçoivent bien les subventions qui leur
sont offertes, mais tout laisse à penser que ces recrutements
auraient eu lieu même en l'absence de toute incitation
de l'État. Ces aides pourront donc être réduites de
130 milliards de francs sans que le marché du travail
ait à en souffrir.
Par ailleurs, les subventions distribuées aux organismes
les plus divers, et notamment aux associations, sont
à l'évidence généralement, sinon nuisibles, du moins
inutiles. Elles pourront donc être notablement diminuées.
Quant à celles destinées aux entreprises publiques,
elles pourront progressivement être réduites à mesure
que s'effectuera leur privatisation ou leur assainissement.
Ces subventions pourront être divisées par deux sans
difficulté, ce qui provoquera une économie de l'ordre
de 70 milliards de francs.
La politique de préférence nationale menée en matière
d'immigration prévoit par ailleurs de réserver aux
seuls Français les prestations de RMI, d'aides personnalisées
au logement et d'aides sociales. Le Fonds d'action
sociale affecté aux immigrés sera supprimé et la politique
de la Ville aussi dispendieuse qu'inefficace abandonnée.
L'ensemble de ces mesures permettra de dégager une
économie supplémentaire d'au moins 75 milliards de
francs.
Des coupes claires complémentaires pourront être
réalisées dans d'autres secteurs de l'administration
où l'inertie bureaucratique et la pusillanimité politique
laissent se poursuivre des actions dépourvues d'intérêt
et pourtant menées à grands frais. Des audits financiers
généralisés, placés notamment sous l'autorité de la
Cour des comptes, ainsi que des méthodes de contrôle
de gestion plus efficaces seront spécialement chargés
de détecter ce type de gaspillage en vue de réaliser
de nouvelles économies.
Ainsi le plan de compression des dépenses publiques
préconisé par le Mouvement national républicain offre-t-il
la possibilité d'alléger significativement le poids
financier de l'État et des collectivités publiques.
Car, à ces économies, à celles qui résulteront du
gel en francs courants de tous les budgets, il convient
d'ajouter celles que produiront les effets bénéfiques
de la politique engagée et, en particulier, celles
résultant de la baisse du chômage qui entraînera la
diminution des crédits d'indemnisation et d'assistance
réservés aux Français en difficulté. Si, de surcroît,
on prend en compte l'augmentation du produit fiscal
que procurera le retour à la croissance, ainsi que
les 120 milliards de francs de recettes supplémentaires
provenant des prélèvements douaniers, on constate
que l'État, ainsi modernisé, disposera à terme des
moyens de baisser les charges et les impôts. Et de
telles perspectives n'ont rien d'utopique puisqu'elles
sont corroborées par certaines études, comme celle
menée par 1'OCDE selon laquelle le montant des économies
à réaliser rapidement s'élève à 300 ou 400 milliards
de francs. L'Institut de l'entreprise évalue de son
côté ces réductions de dépense à 560 milliards de
francs et, de façon plus prudente, les économistes
de la revue Capital les chiffrent à 10 p. cent des
budgets publics, ce qui représente néanmoins 320 milliards
de francs. La politique d'économies massives préconisée
par le Mouvement national républicain se révèle donc
non seulement nécessaire mais aussi parfaitement réaliste,
l'État ne devant plus, demain, pénaliser par ses charges
écrasantes l'appareil de production et d'échange.
La diète législative
Encore faut-il que la puissance publique cesse par
ailleurs de parasiter le monde économique par le truchement
d'une réglementation tatillonne et paralysante. La
bureaucratie française et désormais bruxelloise étouffe
en effet notre pays dans un carcan de règlements,
de directives, de lois, de décrets, d'arrêtés et de
circulaires qui constituent, selon l'expression d'un
rapport du Conseil d'État, une véritable logorrhée
législative et réglementaire. Chaque année, le gouvernement
français suscite la mise en application de mille deux
cents à mille cinq cents textes normatifs, soit une
cinquantaine par jour ! Sans compter ceux concoctés
à Bruxelles dont le nombre s'élève à plus de quatre
mille par an et dont beaucoup sont maintenant directement
applicables dans l'ordre juridique interne de notre
pays.
Cette prolifération bureaucratique est maintenant
tellement abondante que sa prise en compte par les
acteurs économiques représente à elle seule une charge
non négligeable qui se traduit par des recours aux
avocats des consultations d'experts, le recrutement
de salariés spécialisés dans le traitement des procédures.
Selon le Comité central d'enquêtes sur le coût et
le rendement des services publics, l'évaluation financière
du seul travail de secrétariat induit par les formulaires
administratifs se monte à 321 millions de francs pour
les entreprises et à 193 millions pour l'État.
Certes, les activités économiques ne peuvent s'effectuer
en dehors de tout cadre juridique et en l'absence
de toute contrainte réglementaire. Il est nécessaire
que la production et les échanges soient soumis à
des règles de droit, par exemple pour faire respecter
les contrats ou pour protéger la santé et la sécurité
des Français. Mais la situation actuelle dépasse largement
les besoins d'une réglementation légitime. Car n'est-il
pas absurde de laisser croire aux Français que l'État
serait capable de se pencher sur l'ensemble des cas
de figure possibles et de leur apporter des solutions
toutes faites à coups d'interdits et d'obligations
? Outre qu'elle risque d'infantiliser nos compatriotes,
une telle conception étouffe et paralyse les initiatives
aussi bien chez les simples citoyens que dans le monde
de l'entreprise. A ce titre, elle entrave les activités
économiques et rend impossible le redressement du
système de production et d'échange. Il convient donc
de revenir sur cette obsession réglementaire et, pour
inverser ce phénomène, d'envisager plusieurs mesures
d'envergure.
Le gel des textes
En premier lieu, la France doit se protéger de la
boulimie réglementaire de la Commission de Bruxelles.
Si d'ailleurs aucun frein n'est mis à la prolifération
de ces textes, il y aura bientôt moins de disparités
juridiques entre les pays européens qu'il n'en existe
actuellement entre les différents États des États-Unis.
Il faudra donc engager une réforme constitutionnelle
qui rétablira la supériorité des actes juridiques
français sur le droit européen, de façon que les textes
communautaires ne soient applicables dans notre pays
qu'une fois transformés en lois ou en décrets nationaux.
Ainsi la France sera en mesure de recouvrer sa souveraineté
en matière de production réglementaire et de contrôler
le volume et la nature de celle-ci.
Elle pourra notamment procéder à la remise en forme
de l'édifice législatif et réglementaire en vue de
le codifier et de le remodeler en une construction
claire et cohérente. Certes considérable, ce travail,
qui s'apparente à celui des légistes de Napoléon,
apparaît aujourd'hui d'une nécessité impérieuse. Du
reste, une telle entreprise est déjà largement engagée,
il s'agira donc seulement d'en accélérer les travaux,
de telle sorte que tous les textes applicables en
France figurent au plus vite dans un code. Il sera
alors possible, en particulier d'abroger, ou de faire
abroger, par le Parlement des dispositions obsolètes
qui encombrent les textes en vigueur. Mais, surtout,
le gouvernement et le parlement gagneront à cette
réforme la possibilité technique de maîtriser enfin
la masse des lois et des règlements qui régissent
la vie de nos compatriotes. Une codification exhaustive
permettra en effet de gérer non seulement en qualité,
mais aussi en quantité, l'ensemble des normes juridiques
françaises.
Il sera alors possible de lancer une politique visant
à limiter rigoureusement la quantité globale des textes
figurant dans les différents codes. Dans cet esprit,
le gouvernement devra prendre l'engagement et donner
l'instruction à l'administration de ne pas faire voter
de nouvelles lois ni de faire signer de nouveaux textes
réglementaires sans au préalable avoir fait abroger
des normes antérieures ou en avoir fait raccourcir
la rédaction. Ainsi la masse des textes en vigueur
pourra-t-elle rester constante en nombre de signes,
de lignes et de pages. Cette contrainte, pour scolaire
qu'elle puisse paraître, constitue cependant un moyen
très efficace pour le gouvernement de maîtriser enfin
la boulimie normative. Une instance de haut niveau
placée sous l'autorité du garde des Sceaux sera chargée
de tenir à jour les codes et de veiller à la cohérence
des modifications apportées. Cette méthode, qui ralentira
le rythme de production de nouveaux textes, limitera
donc l'incertitude et l'instabilité juridique et améliorera
la qualité, la clarté et la cohérence de notre corpus
législatif et réglementaire.
Ainsi la puissance publique pourra-t-elle retrouver
sa véritable place. Doté de meilleures méthodes de
gestion, allégé de ses entités parasites ou inutiles,
ayant réduit ses coûts de fonctionnement, diminué
ses dépenses et limité la réglementation qu'il sécrète,
l'État cessera d'être un boulet pour l'économie et,
en jouant pleinement son rôle souverain, rendra possible
le retour à la prospérité.