Pour asseoir les bases de son développement, l'économie
française ne doit pas seulement être protégée des
excès du libre-échangisme mondial et fortifiée par
un nouvel ordre social, il lui faut aussi, et surtout,
retrouver sur le marché intérieur les vertus prométhéennes
de l'entreprise, de la concurrence et du gain. Aujourd'hui,
écrasée par un étatisme pesant, elle a besoin, pour
se revivifier, du vent frais des lois de la liberté.
Car ce sont ces dernières qui peuvent assurer sur
le territoire national la croissance la plus efficace
de la production et des échanges et la meilleure allocation
spontanée des biens et des services. Le mouvement
national entend fonder l'expansion de l'économie française
sur le principe du marché libre.
Entre les deux méthodes de régulation du système
économique que sont le marché et la planification,
le Mouvement national républicain choisit donc sans
hésitation le premier terme de l'alternative. Certes,
dans le monde d'aujourd'hui et au niveau de développement
qu'a atteint notre pays, le choix véritable ne se
situe pas entre les versions pures et dures des deux
voies possibles. La planification intégrale a été
pratiquée pendant des décennies en Union soviétique
avec les résultats catastrophiques que l'on sait.
Quant à la formule ultralibérale, elle n'existe sans
doute nulle part, car son adaptation au réel exige
nécessairement un encadrement minimum de l'Etat souverain.
Il ne s'agit donc pas de faire un choix théorique
entre ces deux options aussi utopiques l'une que l'autre,
mais d'affirmer qu'il est aujourd'hui nécessaire pour
le redressement de l'économie française de limiter
le dirigisme dont elle souffre et d'accroître la liberté
dont elle a besoin.
Le singe previsionniste
Ce choix stratégique s'impose d'autant plus que
la conception planificatrice de l'économie se trouve
largement discréditée par les progrès les plus récents
de la pensée économique moderne et par les apports
de la théorie des jeux et des mathématiques de la
décision. Ces nouveaux outils démontrent en effet
que les planificateurs, comme coupables d'une espèce
de péché d'orgueil, commettent l'erreur fondamentale
de croire que l'homme peut maîtriser la totalité des
informations nécessaires à la planification d'un système
aussi complexe qu'une économie. Déjà, l'expérience
atteste quotidiennement la démesure de cette ambition.
Ainsi, depuis plus de trois ans, le Wall Street Journal
organise régulièrement une compétition entre un singe
et les analystes spécialisés dans les cours de la
bourse. Les experts mobilisent tout leur savoir~ utilisent
les meilleurs modèles et font tourner les ordinateurs
les plus puissants. L'animal, quant à lui, lance des
fléchettes sur le journal ouvert à la page de la bourse.
Résultat : les prévisions du singe ne sont pas en
moyenne nettement moins bonnes que celles des prévisionnistes
!
Pourtant, avec la puissance de l'informatique et
des moyens de communication, notre époque offre la
possibilité de collecter et de traiter un nombre considérable
d'informations. Tout cela reste cependant insuffisant
lorsqu'il s'agit de prévoir et de planifier. C'est
ce que nous rappelle l'histoire de Bill Gates, le
créateur milliardaire de Microsoft. En 1980, ce dernier
achète le système DOS (Disc operating system) à un
inventeur génial, mais, ne sachant comment exploiter
ce brevet, il le propose à IBM pour 75 000 dollars.
La grande firme américaine refuse l'offre, incapable
d'imaginer que ce qui lui était présenté allait devenir
le principal système d'exploitation des micro-ordinateurs.
Mais l'histoire ne s'arrête pas là, car, en 1986,
IBM repousse une nouvelle offre de Bill Gates, prêt
à lui céder 10 p. cent du capital de sa société pour
70 millions de dollars. Aujourd'hui, Microsoft est
évalué à 28 milliards de dollars. Dans cette affaire,
ni IBM ni le promoteur de Microsoft lui-même n'avaient
prévu le formidable développement de la micro-informatique
et de ses produits. Les grands maîtres de l'informatique,
qui disposent des moyens les plus sophistiqués, n'ont
pas été en mesure d'anticiper l'extraordinaire essor
de leur propre domaine d'activité !
Le papillon du Brésil
Comment cependant s'en étonner lorsque les progrès
les plus récents de la science nous font découvrir
que l'incertitude, l'instabilité, voire le chaos,
font intrinsèquement partie de la réalité du monde
? En 1961, le mathématicien Edward Lorenz du MIT mettait
au point un modèle de douze équations différentielles
pour simuler l'évolution des conditions météorologiques
sur un ordinateur. Sa méthode procédant par étapes
successives, il décida un jour, pour gagner du temps,
de faire redémarrer sa machine à partir des données
imprimées lors d'une étape intermédiaire plutôt que
de recommencer à zéro avec les données initiales.
Il eut alors la grande surprise de constater qu'entre
les deux procédures un écart considérable s'était
creusé. Lorenz finit par trouver l'explication: les
nombres qu'il avait repris du listing étaient arrondis
trois chiffres après la virgule, alors que ceux traités
par l'ordinateur comportaient une précision double.
Cette différence de un pour mille était donc à l'origine
de la divergence entre les deux calculs. Un écart
infime portant sur les données de départ avait entraîné
une différence majeure au stade des résultats finaux.
Cette expérience révèle l'extraordinaire sensibilité
des phénomènes dynamiques aux conditions initiales,
ce que Lorenz qualifia d'effet papillon : " le battement
d'ailes d'un papillon au Brésil est susceptible de
provoquer une tempête au Texas ". Autrement dit, à
petites causes, grands effets. Tel est l'enseignement
de la théorie du chaos qui, sur le plan théorique,
remet en cause le principe même de la prévision et
donc de la planification.
Le monde est donc si complexe, ses configurations
si instables, les décisions de chacun si diverses
que l'économie d'un pays ne peut être encadrée trop
sévèrement car, à vouloir réglementer le chaos, on
brise l'énergie créative qu'il contient. Aussi, plutôt
que de tout miser sur une macro-régulation centralisée
et limitée, mieux vaut s'en remettre à la multitude
des micro-régulations sécrétées par les acteurs individuels.
L'État et la macro-économie se révèlent à cet égard
moins performants que les agents économiques et la
micro-économie.
L'économie organique
Dans ce contexte d'incertitude et d'instabilité,
le hasard joue lui aussi un rôle non négligeable.
Ainsi, par exemple, le progrès, qu'il prenne la forme
de découvertes scientifiques, d'inventions technologiques
ou de réussites économiques, est bien souvent le fruit
de la chance. On ne retient en effet que les succès,
mais, pour une réussite, combien a-t-il fallu d'échecs
? Il ne faut donc pas planifier ni centraliser, car
en évacuant l'aléatoire, on est statistiquement quasi
certain de perdre. Le monde de l'économie et de la
technologie s'apparente à un organisme vivant régi,
selon la formule du professeur Monod, par les lois
du "hasard et de la nécessité". Comme l'évolution
du monde vivant, qui passe par l'accumulation des
tentatives de mutations génétiques effectuées de façon
aléatoire et dont certaines seulement sont retenues
et concourent au progrès des espèces, l'économie,
pour prospérer, a besoin d'une grande multiplication
des initiatives et de leur sélection par le critère
de l'efficacité, c'est-à-dire par celui du marché.
Une économie plongée dans un marché libre est donc
supérieure à celle régie par le dirigisme. La première
relève de la matière organique, la seconde n'est qu'un
système physique. La première permet la complexité
car elle fonctionne par le biais d'une multitude de
micro-régulations. La seconde est condamnée à la simplicité
car elle ne peut être régulée que de façon centralisée.
La première correspond à la réalité du monde, la seconde
ne reflète qu'une caricature de celui-ci.
Ce que nous appelons l'économie réelle tire donc
l'essentiel de son activité, de son dynamisme et de
sa capacité de création de la multitude des organismes
décentralisés qui la composent. Ce sont donc les agents
productifs élémentaires, c'est-à-dire les entreprises,
qui jouent le rôle principal et c'est donc à leur
niveau que s'opère le développement économique. Aussi
le Mouvement national républicain est-il partisan
d'effectuer un autre choix fondamental consistant
à privilégier une économie de l'offre par rapport
à une économie de la demande.
Depuis des décennies, l'État s'intéresse principalement,
en matière économique, à la demande, laquelle fait
l'objet de la plus forte régulation et des mesures
dirigistes les plus contraignantes. Plutôt que de
développer l'offre, c'est-à-dire la création de richesse,
les technocrates s'efforcent en effet de modifier
l'allocation des ressources. Est-ce d'ailleurs un
hasard si les politiques de relance ont toujours visé
à augmenter artificiellement la demande ? Ainsi, il
y a quelque temps, deux Premiers ministres successifs
n'ont pas hésité à subventionner purement et simplement
les particuliers pour qu'ils achètent des automobiles
au besoin étrangères, immortalisant ainsi leur nom
sans crainte du ridicule au travers des célèbres "balladurettes"
et "juppettes ".
Une telle conception n'est pas saine, car le problème
économique d'aujourd'hui ne concerne pas la demande
mais l'offre. C'est cette dernière qui est déficiente
et doit donc être libérée et encouragée. En effet,
il convient de ne pas la confondre avec la notion
plus triviale de production. De nos jours, chacun
le sait, la fabrication ne pose plus de problèmes
techniques ni quantitatifs et la difficulté principale
concerne la compétitivité et l'adaptation au marché.
Une offre valable s'exprime donc par un produit dont
le coût est performant vis-à-vis de la concurrence
et qui répond à une aspiration, même potentielle mais
solvable, des consommateurs. Pour les entreprises
capables de présenter sur le marché une telle offre,
la question des débouchés ne se pose pas. Comme le
disait déjà Jean-Baptiste Say, l'offre crée toujours
sa propre demande. Il n'est, pour s'en convaincre,
que d'observer les habitudes de consommation: dès
qu'un produit nouveau répondant à une attente de la
population est mis sur le marché, il trouve des acheteurs
en grand nombre, même en plein marasme économique,
si son prix est adapté. L'explosion des ventes de
téléphones portables et la généralisation des micro-ordinateurs
domestiques montrent bien cette évidence. Certes la
prospérité économique ne peut pas dépendre seulement
des marchés de produits nouveaux en pleine expansion.
Il n'en demeure pas moins que la crise trouve aussi
son origine dans une offre insuffisante, soit que
celle-ci manque d'innovation, soit qu'elle se révèle
inadaptée aux besoins, soit enfin qu'elle manque de
compétitivité.
Liberté, concurrence, profit
Dans les trois cas, il est cependant nécessaire,
pour stimuler l'offre, d'encourager la libre entreprise,
d'accepter les profits et de laisser faire la concurrence.
Rien de meilleur, en effet, que la compétition pour
aiguiser l'imagination, la créativité et l'efficacité
d'acteurs économiques indépendants. Aussi la concurrence
apparaît-elle bien comme une vertu éminemment bénéfique
de la vie économique, une vertu qui doit jouer tout
son rôle pour organiser le marché libre préconisé
par le Mouvement national républicain. Ce n'est pas
parce que ce dernier est partisan d'assurer un minimum
de protection aux frontières de la France ou de l'Europe
pour réguler la compétition internationale sauvage
qu'il refuse pour le marché intérieur les effets bénéfiques
et naturels de la concurrence. Dès lors que celle-ci
se trouve limitée territorialement, elle doit pouvoir
s'exprimer sans réserve et pousser à l'innovation
et à la compétition. La concurrence est donc le premier
l'acteur de relance d'une économie de l'offre.
Le second est celui de la liberté d'entreprise.
Dans une économie de l'offre, l'entrepreneur joue
à l'évidence un rôle décisif. Il lui appartient d'ouvrir
de nouveaux horizons de déploiement, d'identifier
des besoins solvables encore inconnus et d'imaginer
des produits inédits, puis de mobiliser les moyens
nécessaires et de développer les efforts de compétitivité
suffisants pour créer l'offre correspondante. Pour
mener à bien une opération aussi complexe, le chef
d'entreprise doit disposer d'un maximum de marge de
manœuvre et d'un minimum de charges et de contraintes.
La liberté permet en effet aux créateurs de chercher,
le plus avantageusement pour eux, et par conséquent
pour la communauté, les systèmes de production et
de distribution les plus performants. Et c'est l'ensemble
de la société qui en tire avantage, car, lorsqu'un
entrepreneur ouvre un nouveau marché, non seulement
les consommateurs en bénéficient, mais l'économie
et la nation toute entière y gagnent un surcroît de
richesse et d'activité.
Encore faut-il que l'entrepreneur y trouve un profit
pour lui et sa société, car la difficulté et les risques
sont tels qu'on ne voit pas pourquoi il s'engagerait
dans cette voie en l'absence d'une forte motivation.
Le profit est donc à cet égard légitime s'il assume
cette fonction d'incitation et de juste rétribution.
D'autant qu'il remplit une seconde mission, au service
de la collectivité cette fois, puisqu'il est en quelque
sorte l'indicateur de la bonne gestion grâce auquel
on sait si l'entreprise effectue la meilleure allocation
possible des hommes et des biens qu'elle mobilise.
En ce sens d'ailleurs, il permet de mesurer les excès,
ceux commis par exemple par certaines entreprises
qui, peu soucieuses de l'ordre social licencient massivement
alors même qu'elles engrangent de très forts bénéfices.
Sous cette réserve, le profit trouve donc sa place
naturelle dans l'économie du marché libre. Du reste,
il constitue une chance pour l'économie dans son ensemble,
car, si l'entrepreneur le dépense, la consommation
qui en résulte contribue à faire fonctionner l'appareil
de production et développe donc le travail. S'il l'épargne,
les sommes correspondantes seront transformées en
crédits à la consommation ou en investissements pour
les entreprises. Dans les deux cas, le profit sert
l'économie et l'emploi, alors que, s'il est ponctionné
par l'État, il sera, pour une large fraction, gaspillé
dans des dépenses stériles ou nuisibles.
Aussi est-ce là la raison pour laquelle le Mouvement
national républicain entend effectuer un troisième
choix fondamental, celui de favoriser les entreprises.
Celles-ci doivent pouvoir constituer une priorité
pour l'Etat et pour la nation et, à cette fin, être
libérées et encouragées sur la scène économique.
Honneur aux entrepreneurs
Il convient pour commencer que l'entrepreneur cesse
d'être vilipendé comme il l'est trop souvent. A tout
le moins, le véritable entrepreneur, celui qui est
créateur ou détenteur de sa société et qui n'a rien
de commun avec ces gestionnaires technocrates qui
passent du secteur public au secteur privé, quittent
leur entreprise pour une autre au gré de l'avancement
de leur carrière et dirigent leurs firmes comme on
administre un bureau de ministère. Les vrais chefs
d'entreprise, Peugeot, Béghin, Dassault, Schneider,
Latécoère, Servier, Renault, Michelin, les frères
Pereire ou encore Jaluzot, la France en a connu beaucoup.
Ces hommes ont créé l'économie française et, à ce
titre, méritent le respect de nos compatriotes. Leur
génie-car ils en avaient-, ils ne le tiraient pas
des diplômes qu'ils avaient ou non obtenus, mais ils
le puisaient dans leur caractère trempé, dans la vitalité
qui les animait et dans ce souffle qui les poussait
à forcer le destin et à aller au bout de leurs rêves.
Ainsi en était-il de Latécoère qui, à la veille de
se lancer dans un grand projet, s'exprimait en ces
termes : " J'ai refait tous les calculs. Ils confirment
l'opinion des spécialistes. Notre idée est irréalisable.
Il ne reste plus qu'une chose à faire : la réaliser
". Le chef d'entreprise est par excellence un homme
de décision et de responsabilité. L'anonymat et la
collégialité ne sont pas son affaire. Est-ce un hasard
si le plus souvent sa société porte son nom ? Il ne
se cache pas, il assume. A une époque où la pusillanimité,
la lâcheté, le conformisme et l'irresponsabilité sont
rois, le chef d'entreprise tranche sur le lot commun,
car, contrairement à certains, il n'hésite pas à affronter
la dure loi des réalités et à côtoyer quotidiennement
le risque. Il connaît le prix de l'effort et de l'échec
et le goût de la vraie vie, celle des hommes qui existent
et qui comptent. Aussi convient-il de promouvoir les
véritables entrepreneurs et d'encourager et d'honorer
les vertus dont ils sont porteurs. Sans doute des
capitaines d'industrie de cette trempe se font-ils
aujourd'hui plus rares à la tête des grandes sociétés,
mais ils sont encore nombreux aux commandes des petites
et moyennes entreprises.
La force des petits
C'est là l'une des raisons pour lesquelles il convient
aujourd'hui de privilégier les petites et moyennes
entreprises. Celles-ci incarnent à merveille les qualités
nécessaires au développement d'une économie de l'offre.
Généralement plus créatives que les grosses sociétés
et plus aptes à réagir rapidement, les PME sont également
mieux adaptées aux incertitudes et aux aléas de l'économie
moderne. Comme le roseau dans la tempête, elles peuvent
plier sans rompre et se transformer avec facilité
en fonction des difficultés qu'elles rencontrent.
Or, ces capacités d'adaptation et de réaction rapide
sont aujourd'hui considérées comme les critères essentiels
de la bonne gestion. Ainsi que le soulignent P.A.
Julien et M. Marchesnay, " la petite entreprise est,
de par sa taille, beaucoup plus apte à s'adapter aux
changements. Les PME compensent le manque de certaines
économies d'échelle par une plus grande flexibilité,
en particulier dans une période de changement rapide
". On peut donc considérer avec l'économiste Tom Peters
que " le dogme de la grandeur pour la grandeur a vécu
(…) les dimensions appropriées sont probablement plus
petites qu'on n'aurait imaginé (...). La masse critique
peut se résumer dans certains cas à un noyau de dix,
vingt ou trente personnes ".
En revanche, les grands groupes ont du mal à s'adapter
à la conjoncture, car leurs structures sont souvent
rigides et leur organisation bureaucratique. Elles
présentent donc une certaine inertie face aux retournements
de situation et, lorsqu'elles s'adaptent enfin, c'est
avec brutalité, en procédant à des licenciements massifs.
Ainsi, de 1981 à 1990, les grandes entreprises françaises
ont supprimé des emplois par dizaines de milliers
: Saint-Gobain a perdu 35 000 emplois, Thomson 23
500, Renault 58 430. Handicapés par leur taille et
confrontés aux lois antitrust, certains groupes américains
en viennent d'ailleurs à se scinder en plusieurs entités
distinctes. A l'automne 1995, le groupe ATT, numéro
un mondial du téléphone, a éclaté en trois unités
indépendantes et, depuis lors, ses performances globales
sont de nouveau en hausse. Aux Etats-Unis encore,
où les entreprises ne sont pas bridées par l'État,
les PME suppléent aux carences des grands groupes
en créant des emplois là où ceux-ci licencient. Ainsi,
en 1993 à Milwaukee, lorsque la société Allis Chalmers
a fait faillite, mettant à pied trente mille personnes,
le tissu des PME de la région a compensé ces pertes
en créant un nombre d'emplois équivalent.
En France, les PME constituent, malgré les difficultés
propres à notre pays, le secteur le plus important
de l'économie nationale. Elles emploient 13,4 millions
de salariés pour une population active de 22,2 millions
et produisent 64 p. cent de la richesse de la nation.
Par ailleurs, sept millions de personnes travaillent
dans une société de un à cinquante salariés et une
PME sur deux est située dans un département non urbain.
En faisant travailler les Français dans des entreprises
à taille humaine et dans des départements où il fait
bon vivre, les PME jouent donc un rôle indéniable
dans la préservation de la qualité de la vie. Nos
compatriotes apprécient manifestement cet avantage
puisqu'ils sont 57 p. cent à préférer travailler dans
des structures petites ou moyennes. Pourtant, dans
ce domaine, la France est en retard par rapport à
d'autres nations particulièrement performantes sur
le plan industriel comme les États-Unis et le Japon,
où la taille médiane des entreprises est respectivement
de cinquante-cinq et vingt-cinq salariés, alors qu'elle
atteint dans notre pays quatre-vingts employés. De
surcroît, le nombre de PME nouvellement créées sur
le territoire national est dérisoire comparé à celui
de nos concurrents. Ainsi, dans la période 19701990,
le taux de croissance de la population des PME n'a
pas dépassé 0,6 p. cent en France, alors qu'il s'élevait
à 2,3 p. cent au Japon, à 3,2 p. cent en Grande-Bretagne
et à 7,7 p. cent aux États-Unis.
Les entreprises d'abord
Il est vrai que les conditions imposées aux entreprises
dans notre pays sont aujourd'hui particulièrement
néfastes et contrastent singulièrement avec les efforts
considérables qu'elles ont accomplis pour améliorer
leurs performances. La productivité du travail n'a
en effet jamais été meilleure puisque, dans ce domaine,
la France est passée, entre 1950 et 1994, du dernier
rang des pays développés au premier rang devant les
États-Unis avec un ratio de 29,60 dollars de PIB par
heure de travail. C'est dire si la baisse régulière
de la rentabilité des entreprises n'est donc pas due
à des insuffisances qui leur seraient propres, mais
bien aux contraintes fiscales et sociales auxquelles
la puissance publique les soumet. Le résultat, c'est
une baisse du chiffre d'affaires des entreprises françaises
depuis 1993, ainsi qu'une motivation moindre des entrepreneurs.
Déjà, en 1991~ la COFREMCA avait sonné l'alarme :
" Pour la première fois, nous voyons baisser en France
la motivation d'entreprenariat, c'est-à-dire la motivation
à créer sa propre entreprise."
Comment s'étonner de ce recul alors que charges
et contraintes de toutes sortes s'accumulent sur les
petites et les moyennes entreprises et que le gouvernement
ne propose rien de déterminant en leur faveur ? Certes,
il leur tient le discours démagogique des bonnes intentions
mais ce n'est pas d'une énième loi PME que les entreprises
ont besoin. Les cent quarante mesures de la loi Madelin
de 1993 et la centaine de dispositions de la loi Raffarin
de 1996 ne servent qu'à compliquer un dispositif déjà
inappliqué parce qu'inapplicable. Le poids de l'étatisme
reste aussi fort et lorsque les effets conjugués de
la concurrence sauvage et de l'étouffement bureaucratique
ne les conduisent pas à la mort, les PME manquent
désespérément d'oxygène pour se développer. D'une
part, leurs profits sont obérés par les ponctions
fiscales et ne leur permettent pas, comme à leurs
homologues américaines, de bénéficier d'un véritable
autofinancement. D'autre part, le crédit bancaire
reste largement contrôlé par l'État et donc dispensé
selon des processus et des critères bureaucratiques
excluant toute prise de risque. Les PME éprouvent
donc les plus grandes difficultés à obtenir les financements
dont elles ont besoin.
Aussi est-il essentiel pour le redressement économique
de la France de miser sans réserve sur les entreprises
et de mettre en œuvre un programme de grande envergure
visant à leur rendre leur capacité productive, à alléger
leurs charges, à faciliter leur financement, à limiter
la réglementation à laquelle elles sont soumises et
à leur donner les moyens d'investir, notamment pour
exploiter au maximum les progrès technologiques.
Vive la science !
Dans le cadre du marché libre, le Mouvement national
républicain veut en effet asseoir le renouveau économique
de notre pays sur une quatrième priorité qui n'est
autre que le progrès scientifique et technique. La
France ne peut se permettre de manquer la révolution
technologique qui se déroule sous ses yeux et à laquelle
elle était d'ailleurs mal préparée. Au lendemain de
la guerre, l'économie française évoluait encore dans
la logique du siècle dernier. Le tissu économique
était constitué de grandes unités et les mécanismes
de production restaient comparables à celui d'une
machine : plus on produisait, plus on vendait, plus
on s'enrichissait et, pour paraphraser Henry Ford,
peu importait l'emballage. Aujourd'hui, tout est changé
puisque la France est entrée il y a vingt ans dans
une ère nouvelle. La micro-informatique est devenue
un produit grand public au point qu'on peut acheter
dans le commerce pour 10 000 francs un ordinateur
aussi puissant que celui dont la NASA s'est servie
pour envoyer la fusée Apollo vers la lune. Les techniques
de communication ont accompli des progrès spectaculaires,
tout comme l'automatisme et la robotique. Et la combinaison
de tous ces facteurs nous plonge dans un monde nouveau
qui impose progressivement ses moyens, sa logique
et ses avantages à tous les secteurs de la vie quotidienne
comme de l'activité économique. L'intensification
de la concurrence et sa mondialisation en sont une
conséquence directe, aussi le problème de l'industrie
n'est-il plus de produire, mais d'affronter la bataille
de la compétitivité et la guerre économique internationale.
Après la révolution industrielle, c'est la révolution
de l'information qui s'accomplit sous nos yeux.
Pour faire face à ce bouleversement, les entreprises
ont le choix entre deux logiques. La première les
conduit, sous la pression de la concurrence, à baisser
leurs coûts et, pour ce faire, à sous-qualifier leur
personnel et à réduire leurs salaires, ce qui entraîne
une diminution du pouvoir d'achat et une baisse de
l'activité économique. C'est la logique de la régression
et de la paupérisation. L'autre doit pousser les sociétés
à réaliser des progrès de compétitivité grâce à la
technologie, ce qui nécessite une plus grande qualification
des emplois et donc des hausses de salaire : c'est
la logique du développement, qui exige l'utilisation
maximale du progrès technologique. Ce dernier est
en effet l'arme principale dont disposent la France
et les pays occidentaux pour conserver leur suprématie
mondiale. Certes, beaucoup de pays nouvellement industrialisés
se sont adaptés à la science moderne, mais leur savoir-faire
se limite généralement au pire au plagiat, au mieux
à l'adaptation ou au développement d'une technique
déjà mise au point, toutes pratiques que l'on qualifie
du terme pudique de transfert de technologie. La recherche
fondamentale, la découverte scientifique, l'invention
technologique restent encore et doivent demeurer l'apanage
des grandes nations occidentales.
La technologie bénéfique
Il convient donc que notre pays joue sans réserve
la carte du progrès technique. Dans tous les secteurs
de l'économie, en effet, des innovations sont possibles,
car la période contemporaine a ouvert de nouveaux
espaces de connaissance dont personne n'a encore tiré
toutes les conséquences technologiques. La France
doit sans tarder se livrer avec ardeur à cette entreprise
prométhéenne qui constitue à bien des égards la voie
royale du retour à la prospérité et à l'expansion.
Le progrès technologique est sans conteste synonyme
de progrès économique et le recours aux techniques
les plus modernes et les plus sophistiquées s'est
révélé porteur de productivité et de croissance. Bénéfique
sur le plan économique, le développement de la technologie
l'est aussi sur le plan social, car ce serait une
grave erreur de croire qu'il joue contre l'harmonie
nationale et qu'il engendre le chômage, par exemple.
Certes, l'automatisation des tâches réduit le nombre
d'emplois, mais elle apporte un surcroît de richesses
et donc de pouvoir d'achat, de même qu'elle entraîne
une baisse des prix de vente et donc une augmentation
de la consommation. Autant d'avantages qui favorisent
la croissance et la création d'emplois nouveaux, généralement
plus intéressants et mieux rémunérés que ceux qui
ont été détruits. L'apparition de la machine à vapeur
a, il est vrai, fait disparaître la diligence, mais
elle n'a pas supprimé les déplacements. L'économiste
Schumpeter a même démontré que l'industrie des transports
née du chemin de fer a créé plus d'emplois que l'abandon
de la voiture à cheval n'en a fait perdre. Ajoutons
que la machine remplace l'homme dans les tâches standardisables
de faible qualification et qu'en revanche, elle suscite
la création de postes de plus haute compétence, notamment
pour assurer son contrôle et sa maintenance. Cette
évolution, d'ailleurs générale, est directement liée
à la révolution technologique que connaît notre pays
: la pénibilité des tâches diminue avec, par exemple,
la disparition progressive du travail à la chaîne,
alors que des emplois plus qualifiés et humainement
plus valorisants ont tendance à se multiplier.
La stratégie d'excellence
C'est dire s'il est important de revenir sur deux
erreurs d'envergure commises au cours des dernières
années par l'établissement de notre pays: le recours
à l'immigration et la non-adaptation de l'école. Car
ces deux fautes majeures expliquent à elles seules
la difficulté de notre économie à s'adapter à la nouvelle
révolution industrielle. Faire appel aux travailleurs
immigrés, c'est-à-dire à une main-d'œuvre sous-qualifiée,
c'était céder à la facilité, renoncer à moderniser
l'outil de production et tourner le dos au progrès
technologique et au monde moderne. De même, ne pas
adapter le système éducatif aux exigences de l'économie
d'aujourd'hui, ne pas assurer une véritable formation
professionnelle et ne pas promouvoir les hautes qualifications,
c'était là encore renoncer à préparer les entreprises
aux défis scientifiques et techniques du IIIe millénaire.
Le Mouvement national républicain estime donc essentiel
de corriger ces erreurs et, au-delà, d'agir afin que
les firmes françaises puissent promouvoir et exploiter
au mieux la technologie au service de leur développement.
Il importe donc de prévoir les mécanismes de financement
les mieux adaptés aux projets technologiques des entreprises
et de revoir en conséquence les modes d'attribution
et les critères d'affectation des crédits publics
de la recherche. Ceux-ci font partie des dépenses
utiles du budget de l'Etat et devraient être augmentés
significativement le plus rapidement possible. Encore
faut-il qu'ils ne viennent pas alimenter le vase sans
fond d'une recherche stérile et bureaucratisée telle
qu'on la découvre en arpentant les couloirs de certains
laboratoires du CNRS. Là encore, la lutte contre l'étatisme
sera nécessaire et un redéploiement de la recherche
scientifique devra être engagé pour la placer sans
réserve au service de la stratégie d'excellence technologique
que l'industrie française se verra proposer.
Tels sont donc les leviers que le
Mouvement national républicain entend utiliser pour
rendre au système français de production et d'échange
le dynamisme interne dont il est capable. En réhabilitant
les lois de la liberté, en misant sur le développement
d'une économie de l'offre, en favorisant les entreprises,
tout particulièrement les PME, et en jouant sans réserve
la science et la technologie, le mouvement national
opte en toute clarté, sur le plan intérieur, pour
le marché libre qu'il considère comme le seul apte
à rétablir la prospérité de notre pays. Encore faut-il
rallumer dans ce cadre, les principaux moteurs du
développement.